Page 136 - Le Operazioni Interforze e Multinazionali nella Storia Militare - ACTA Tomo I
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           Les croises et la prise de Lisbonne (1147)


           João Gouveia MOnTEIRO




                a conquête de Lisbonne sur les Maures fut un des épisodes les plus importants de
           L l’histoire du Portugal et constitua certainement l’exploit militaire le plus signifi-
           catif du premier roi lusitanien – Afonso Henriques (Afonso I). Comme l’ont souligné
           les historiens et comme le suggère aussitôt la simple observation de la carte de l’Europe
           contemporaine, le Portugal fut une construction politique arrachée à son propre destin,
           attendu que “rien dans la géographie physique ou humaine, dans l’économie ou dans
           la tradition des régions qui vinrent le composer ne déterminait que se détachât du reste
           de la Péninsule le rectangle qui finit par constituer le royaume le plus occidental de
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           l’Europe” . Sans le triomphe retentissant remporté à Lisbonne en 1147, rien de tel ne
           serait probablement arrivé : excellent exemple du rôle crucial joué par l’art militaire
           comme facteur de transition et de transformation de l’Histoire.
              Le Portugal commença par être un petit comté créé à la fin du IXe siècle par le roi
           de Castille et Léon, Afonso VI, comme moyen de défendre la région sud du très vaste
           - à l’époque - comté de Galice, constamment attaqué par les forces au service de la
           dynastie musulmane des Almoravides. Lorsque naquit, en 1096, le Comté de Portucal,
           c’était un espace minuscule, circonscrit aux territoires des villes actuelles de Porto et de
           Coimbra, et guère plus. Il est évident que le roi de Castille et Léon ne désirait pas aliéner
           définitivement ce territoire mais seulement en confier la défense, à titre provisoire, à un
           chevalier français, Henri de Bourgogne, à qui il concéda la main d’une de ses filles (la
           bâtarde Teresa). Cette forte liaison d’Henri de Bourgogne à la famille royale ne laissait
           pas supposer le destin d’abord autonome puis indépendantiste qui était réservé au petit
           Comté portucalien. Henri le défendit efficacement contre les attaques musulmanes et,
           après sa mort, survenue en 1112, sa veuve Teresa poursuivit son oeuvre, ayant même
           rêvé d’étendre ses frontières au Nord, au détriment du royaume de Galice.  Elle n’y
           réussit pas, en grande partie à cause de l’opposition de son fils Afonso Henriques et de
           la noblesse et du clergé portucaliens, peu désireux de s’exposer à la concurrence des
           lignages de la noblesse de Galice ou de se soumettre à la tutelle du puissant archevêque
           de Saint-Jacques de Compostelle.
              C’est ainsi qu’Afonso I l’emporta sur sa propre mère dans une bataille livrée en 1128,
           près de Guimarens, et décida de repenser toute la stratégie d’agrandissement de son petit
           comté. Si, dans une phase initiale, il nourrit encore quelques velléités d’expansion dans
           d’autres directions, c’est vers la frontière sud qu’il se tourna à partir de 1131. Il déplaça
           alors sa cour à Coimbra et décida d’affronter directement les Almoravides. Entre 1131 et
           1145, Afonso I lança de venimeuses expéditions au sud du fleuve Mondego, construisit
           des châteaux forts (comme celui, par exemple de Leiria) dans les régions récemment

           1   Bernardo Vasconcelos e Sousa, in Rui Ramos, Bernardo Vasconcelos e Sousa et Nuno Gonçalo Mon-
              teiro, História de Portugal, Lisboa, Esfera dos Livros, 2009, p. 85.
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