Page 137 - Le Operazioni Interforze e Multinazionali nella Storia Militare - ACTA Tomo I
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          conquises, et contrôla les principales voies et même les routes intérieures, d’où (sortant
          de la forte base installée à Santarem) pouvaient partir les offensives musulmanes contre
          le nord chrétien.
             Il est clair qu’Afonso avait l’ambition de repousser la frontière sud de son territoire
          jusqu’à la ligne du fleuve Tage et qu’il avait également conscience que, le faisant aux dé-
          pens des musulmans (et non des chrétiens de Galice), il aurait beaucoup plus de chances
          de se voir reconnaître comme roi par le Saint-Siège et par le monarque de Castille et
          Léon (qui, depuis 1126, se trouvait être son propre cousin Afonso VII).
             Cette stratégie se révéla productive et permit même au comte portugais de réaliser
          des incursions profondes et téméraires en territoire almoravide, comme celle qui, en
          1139, le conduisit jusqu’à un point situé quelque part entre Badajoz et Séville, donnant
          lieu à la fameuse « bataille d’Ourique », considérée par beaucoup comme « le premier
          soir portugais ». Impressionné par tant de succès, en 1143, à l’entrevue de Zamora,
          Afonso VII de Castille et Léon reconnut son cousin comme roi de Portugal et celui-ci
          commença aussitôt à caresser l’espoir d’un triomphe décisif : la conquête de Lisbonne,
          la plus grande ville musulmane du sud-ouest péninsulaire ! Le jeune roi n’ignorait pas le
          risque d’une telle opération ; il avait probablement fait, en 1142, une première tentative,
          qui avait échoué par manque de moyens. Il savait donc qu’une entreprise aussi auda-
          cieuse requérait une collaboration externe nombreuse et très professionnelle.
             Or, ce fut précisément l’objet des négociations entre Afonso Henriques et le Saint-
          Siège entre 1145 et 1147. Un fait déterminant joua en faveur du monarque lusitanien : à
          Noël 1144, en Terre Sainte, les musulmans avaient réussi à reconquérir la ville d’Edessa,
          mettant un terme à l’un des quatre Etats Latins d’Orient fondés à la suite de la Première
          Croisade en Syrie-Palestine. Aussi le pape Eugène III (un cistercien) avait-il appelé à
          une nouvelle croisade, que le célèbre Saint Bernard de Clairvaux avait prêchée dans
          diverses régions du centre et du nord de l’Europe, surtout en France et en Allemagne.
          Son appel avait suscité l’adhésion de nombreux cavaliers, à commencer par celles du roi
          de France Louis VII et de l’empereur Conrad III, qui avaient pris la tête de cette nouvelle
          aventure au Moyen-Orient.
             Comme on le sait, Bernard de Clairvaux lui-même, fin 1146 ou début 1147, envoya
          une lettre à Afonso I, lui annonçant le passage par le Portugal, l’été suivant, d’une grande
          flotte de croisés en transit vers la Terre Sainte, et l’autorisant à y recourir pour réaliser
          son voeu de conquérir Lisbonne. Le roi portugais ne se fit pas prier et, dès mars 1147, il
          organisa une opération-éclair, à la manière d’une  action de commando, qui lui permit
          de récupérer Santarem, la principale place-forte musulmane entre Coimbra et Lisbonne ;
          sans quoi, aucune tentative contre Lisbonne ne serait assurée, aucune conquête durable.
          A partir de là, la voie était ouverte pour la grande aventure.
             Environ 160 navires croisés en route vers la Terre Sainte avaient quitté le port de
          Dartmouth (Angleterre) le 23 mai 1147, atteignant Porto le 16 juin ; un groupe plus petit,
          venant de France et des Flandres, y arriva quelques jours plus tard. Au total, on comptait
          de 10 à 13 000 hommes, de diverses nationalités : Anglais, Normands, Flamands, Alle-
          mands (de Cologne) et quelques Français (de Boulogne).
             L’évêque de Porto, D. Pedro Pitões, les reçut sur le parvis de la Cathédrale de la ville
          avec un discours enflammé, que le croisé anglo-normand Raul de Glanville, membre de
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