Page 267 - Conflitti Militari e Popolazioni Civili - Tomo I
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rapportèrent également les souffrances de la population, réduite à manger de l’herbe et évo-
quèrent les nombreux décès quotidiens - entre 20 et 25 - provoqués par la faim à Séville,
Malaga, Puerto Real …
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Il s’avère encore difficile aujourd’hui d’établir un bilan de cette politique. Sur le plan
matériel, la faillite économique semble avérée, notamment pour le bétail, qui ne retrouverait
son importance d’avant guerre qu’en 1824 seulement. Quant aux pertes humaines, les pre-
miers voyageurs romantiques les estimaient, dans les premières décennies du XIX siècle,
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entre 300 000 et un million pour l’Andalousie . Or, cette fourchette apparaît désormais très
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fortement exagérée. On évalue actuellement le total des pertes espagnoles à environ 500 000,
ce qui fait cependant de la guerre d’Indépendance le conflit le plus meurtrier de l’histoire de
l’Espagne contemporaine en mortalité relative (près de 5% de la population, contre moins de
2% pour la Guerre civile) . Un historien espagnol avait certes avancé le chiffre de 10 000
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morts, affectant surtout les plus jeunes, pour le royaume de Grenade durant le conflit, mais
sans exposer comment il parvint à ce résultat .
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Faute de recensements généraux entre ceux de 1787-1797 (ces derniers se révélant assez
peu fiables, et de toute façon invalidés par la crise démographique du tournant du siècle) et
de 1857, les quelques études récentes se sont focalisées sur les zones les mieux pourvues en
sources sérielles, pour l’essentiel, les registres mortuaires paroissiaux. Ce sont notamment la
Catalogne, la Nouvelle Castille ou les asturies . 1812 représenta bien un pic de mortalité
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pour le Midi de l’Espagne, mais à ma connaissance, seule une perspective de micro-histoire
en rend compte, par l’examen de la Casa Cuna (orphelinat) de Grenade, spoliée de ses res-
sources habituelles par les occupants. Avec 468 décès cette année, le taux de mortalité infan-
tile s’y monta à 97%, contre une moyenne de 49,3% entre 1780 et 1790 .
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cOnclusiOn
Diverses tentatives de guerre totale eurent effectivement lieu dans les deux camps, du-
rant la Guerre d’Espagne. Gouverneur de la Vieille Castille au printemps 1811, le maréchal
Bessières utilisa des méthodes répressives qu’un observateur – d’autant plus horrifié qu’il
ère
33 a. Fée, Souvenirs de la guerre d’Espagne (1809-1813), Paris, Michel Lévy, 1861, p. 135 (1 édition 1856) ;
lettre de Maransin au marquis de Bouillé du 08/03/1812 in A. L. Grasset, Málaga, provincia francesa…, op.
cit., p. 437 ; AMAE, Correspondance consulaire et commerciale, Malaga, 17, rapport du consul Augustin
Proharam du 10/05/1812 ; Bouillé, op. cit., III, p. 516 ; Manière, Souvenirs d’un canonnier de l’Armée d’Es-
pagne, Paris, J. Rouam & Cie, 1892, p. 31.
34 M.- J. Álvarez Arza, La economía andaluza vista por los viajeros del siglo XIX, Madrid, UNED, 1986, p.
98-99.
35 E. Canales Gili, « 1808-1814 : démographie et guerre en Espagne », Annales Historiques de la Révolution
Française, 336, avril-juin 2004, p. 37-52, p. 50.
36 E. Díaz Lobón, « La población granadina a principios del siglo XIX y los efectos demográficos de la Guerra
de la independencia », Actas del I Congreso de Historia de Andalucía, Andalucía contemporánea, Córdoba,
Monte de Piedad y Caja de Ahorros, 1979, I, p. 67-75, p. 71.
37 E. Canales Gili, « 1808-1814 : démographie et guerre en Espagne », op. cit.; M. C. Ansón Calvo & F. Man-
zano Ledesma, « Repercusiones poblacionales en Asturias de la Guerra de la Independencia (1808-1814) »,
La Guerra de la Independencia en Málaga y su provincia, op. cit., p. 451-472.
38 M. Vallecillo Capilla, Política demográfica y realidad social en la España de la Ilustración. La situación del
niño expósito en Granada (1753-1814), Universidad de Granada, 1990, p. 110-113.