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266 XXXIV Congresso della CommIssIone InternazIonale dI storIa mIlItare • CIHm
(…) Puisque les Espagnols s’obstinent à vouloir être malheureux, qu’ils le soient » .
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Mais le principal obstacle était économique, puisque certaines des mesures adoptées par
Soult lésaient à l’évidence le commerce (limitations des déplacements et transports, sur les
routes, mais aussi sur le Guadalquivir rendu navigable entre Cordoue et Séville par les soins
de l’occupant) et l’agriculture (arrachage forcé d’oliviers et autres arbres fruitiers trop pro-
ches des voies de communication, nombreuses réquisitions de bétail de trait, corvées peu
ou pas payées). Cela ne pouvait que compromettre le ralliement des notables, même s’ils
étaient souvent victimes d’extorsions et d’exactions diverses de la part des insurgés. De plus,
l’économie andalouse, en proie aux réquisitions et aux contributions financières répétées de
l’occupant, ne permettait pas d’inscrire la guerre totale dans la durée. Ainsi, la production
agricole n’assurait pas l’autosuffisance en temps normal. Soult en était conscient, et il s’ef-
força de développer commerce (blé, orge, riz, morue séchée…) avec le Maroc, notamment
par l’intermédiaire de la maison de commerce Grévignée de Malaga, et guerre de course
comme palliatifs .
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La Régence réfugiée à Cadix se réclama de la loi du talion pour promulguer la guerre
sainte dès l’été 1810, en s’appuyant sur les cruzadas, corps paramilitaires formés ou encadrés
de religieux, qui avaient été organisés à partir du printemps 1809 . En avril 1812, elle recou-
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rut à l’embargo sur les vivres à destination des ports occupés , arme bien plus efficace en
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l’occurrence, d’autant qu’elle fut appuyée par un resserrement du blocus britannique en mai.
Dès lors, ses réserves épuisées et la famine se répandant, l’Armée du Midi ne pouvait espérer
se maintenir longtemps en Andalousie, malgré la prétention de Soult d’en faire le pôle de la
résistance impériale aux offensives de Wellington, face aux ordres pressants de Joseph en
faveur d’un repli général sur Madrid.
Bien sûr, les civils furent les premiers touchés, un médecin patriote le constata en avril
1812 à Malaga, doublement éprouvée, par le déclin de son trafic portuaire comme par l’afflux
de plusieurs milliers de paysans réfugiés. « Des personnes de tout âge et origine sociale se
battaient pour une feuille de salade, un trognon de chou, ou le moindre déchet jeté parmi les
ordures ; les citrons et les oranges amères passaient pour des mets exquis, et l’on disputait
aux chiens les os jetés par les Français et leurs partisans » . Plusieurs témoins français
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28 Lettre du général Maransin au capitaine Serra (21 dragons), chef d’une colonne mobile, du 28/02/1812,
ère
in a. l. Grasset, Málaga, provincia francesa (1811-1812), Universidad de Málaga, 1996, p. 417-418 (1
édition, française, 1910).
29 Cf. U. Bonnel, La France, les États-Unis et la guerre de course (1792-1815), Paris, Nouvelles Éditions
Latines, 1961, p. 240, 282 et 307 ; et J.-M. Lafon, « Entre fortune de mer et déboires terrestres : la course
française à Almeria (1810-1812) », Course, corsaires et forbans en Méditerranée XV–XX siècle, toulon,
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SFHM, 2005 (sous presse).
30 Cf. P. Pascual Martínez, « Frailes guerrilleros en la Guerra de la Independencia », Historia 16, 280, 1999,
p. 36-56. Il ne faut pas surestimer leur efficacité, ni sans doute l’enthousiasme du clergé espagnol à s’engager
dans une guerre sainte, cf. C. Rodríguez López-Brea, « La Iglesia española entre 1808 y 1810. Un cruce de
viejos y nuevos problemas », Respuestas ante una invasión, número extraordinario de la Revista de Historia
Militar, 2006, p. 183-205, p. 195-196.
31 BS, Colección Gómez de Arteche, 316.03, Proclamation aux Andalous du 19/04/1812.
32 J. Mendoza y Rico, Historia de Málaga durante la revolución santa que agita a España desde mayo de 1808,
edición y notas de M. Olmedo Checa, Málaga, Real Academia de Bellas Artes de San Telmo y Academia
Malagueña de Ciencia, 2003, p. 208.