Page 124 - Conflitti Militari e Popolazioni Civili - Tomo I
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              Il n’y a donc, dans le monde grec, de véritables professionnels de la guerre que les mer-
           cenaires. Leur état est d’autant plus méprisé qu’il s’exerce le plus souvent, à partir de la
           réforme hoplitique, à l’étranger : la manière grecque de faire la guerre est tenue pour la plus
           efficace, à partir du VI ème  siècle, aussi bien en Egypte, dans le monde perse, à Chypre ou en
           italie du sud. inévitablement étrangers, les mercenaires vivent à part, hors cités, dans des
           camps tels celui du Ténare ou celui, récemment fouillé, qui se trouve à proximité de Cûmes,
           et ils n’ont d’autre ambition, lorsqu’ils sont Grecs, que de revenir dans leur Cité fortune faite
           et d’y vivre comme un citoyen respecté, des terres qu’ils auront pu y acquérir. Cadets de fa-
           mille, originaires de régions pauvres ou jeunes gens fortunés mais baroudeurs comme le fut
           encore Xénophon, ils font comme hoplites ou comme cavaliers ce que tout citoyen a appris
           à faire, le mercenariat étant devenu le substitut de la colonisation.
              La Guerre du Péloponnèse changea cependant la donne. Devenue acharnée, totale, exi-
           geant des expéditions de longue durée comme celles de Brasidas ou de Sicile, elle rendit plus
           difficile le maintien du système du soldat-citoyen. Pour bien faire la guerre, il fallait l’avoir
           appris et l’avoir fréquemment exercée. La transformation se fit à un double niveau, celui des
           chefs et celui de certaines troupes.
              Traditionnellement, dans le monde grec, les cadres militaires étaient élus. De même, les
           chefs étaient des magistrats élus par tous les citoyens. Point n’était nécessairement besoin
           qu’ils fussent spécialistes du commandement : Sophocle ainsi fut élu stratège à Athènes.
           Périclès était plus un politique qu’un spécialiste de la guerre. Mais l’importance de la guerre
           exigea des choix non plus politiques mais techniques. la sociologie des stratèges athéniens
           le montre : un Nicias, un Conon sont des spécialistes. On le voit aussi ailleurs : Lysandre fut
           navarque à Sparte malgré son peu de naissance. Désormais, les chefs militaires sont formés
           pour cela. L’archétype du chef nouveau pourrait avoir été Brasidas, selon une étude récente .
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           Plus tard, il est clair que les stratèges athéniens du iV ème  siècle sont des professionnels de la
           guerre et ne sont plus des politiques. au point de devenir ces stratèges condottieri dont K. W.
           Pritchett a mis en évidence les parcours : entre les périodes où ils sont élus par leur cité pour
           commander en chef ou pour préparer la guerre, ils se font mercenaires au service d’un souve-
           rain étranger … et parfois en même temps de la diplomatie de leur Cité . ils ont leurs troupes,
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           fidèles, qu’ils entraînent qui les suivent partout en formant le fer de lance de leur contingent.
           ils ont de facto la formation qu’auront les souverains hellénistiques, chefs ès qualités, ce qui
           leur permettra d’exercer des commandements jusqu’à des âges élevés.
              A cette professionnalisation des chefs répond une semi-professionnalisation des troupes.
           Elle est inscrite dans les nécessités tactiques. Se développent en effet durant la même guerre
           du Péloponnèse, des corps spécialisés : peltastes d’abord, puis javelotiers, frondeurs, archers,
           dont le rôle dans l’action peut être déterminant. Sont-ce des mercenaires ? Aux yeux des
           auteurs anciens, oui : les peltastes sont thraces, les archers sont crétois. Mais ce sont aussi
           des spécialistes qui réduisent les citoyens au rang d’amateurs. Or, des professionnels forcés,
           il y en a : en entrainant des prises et des destructions de villes, en créant des apatrides - même

               les citoyens à Sparte n’étaient pas les seuls à combattre.
           8   J. Boëldieu-Trevet, Commander dans le monde grec au V siècle avant notre ère, P.U.de Franche Comté,
                                                       e
               2007.
           9   The Condottieri of the fourth century, The Greek State at War, II, p. 59-116.
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