Page 70 - Conflitti Militari e Popolazioni Civili - Tomo I
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              Il s’agit de deux visions opposées de la guerre qui peuvent sans doute «cohabiter »
           chez un auteur. Comme c’est le cas de Jonathan Swift qui, cependant, en considérant les
           deux perspectives de la guerre comme des aberrations des très lâches Yahou, c’est-à-dire
           les bêtes aux  traits humais habitant le pays des Houyhnhnms, ne s’intéressait guère à la
           relation existante entre les conflits militaires et les populations civiles, tout en préférant
           diriger ses traits contre le métier d’un homme de guerre, une profession que, sarcasti-
           quement, il définissait « le plus beau de tous les métiers car, qu’est-ce qu’un homme de
           guerre? C’est un Yahou payé pour tuer de sang-froid ses semblables qui ne lui ont fait
           aucun mal » . De notre point de vue, l’oeuvre du graveur lorrain Callot, qui a vécu  entre
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           le XVI et le XVII siècle et qui eut le temps et la manière de documenter la phase centrale
           de la guerre de Trente ans, nous apparaît plus intéressante.   Dans son cas spécifique,
           on peut entrevoir les étapes d’un processus visant à universaliser la représentation de la
           guerre : le récit fondé exclusivement sur les soldats est présenté en conjonction avec un
           catalogue de «dommages collatéraux» de la guerre, à l’exemple de ce qu’il arrive dans
           une eau-forte de la fin du XVII siècle du peintre italien Giuseppe Maria Mitelli, qui il-
           lustre l’incendie d’une ville, le massacre de ses habitants, et le viol d’une jeune fille  tout
           en habillant les victimes et les bourreaux de robes, de tuniques et de cuirasses d’époque
           romaine : l’antiquité apparaît moins engageant mais, en  insistant sur le cordon ombilical
           qui relie les deux perspectives, il intitule son tableau  «Il soldato osserva quel che fa» (le
           soldat observe ce qu’il fait ).
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              Le thème de la guerre est abordé pour la première fois de manière significative par
           Callot dans une gigantesque gravure de 1628 – formée par six planches –  dénommée
           Le Siège de Breda. Dans cette œuvre il célèbre la conquête de la ville par le général es-
           pagnol Ambrogio Spinola qui, tout en étant un banquier de Gênes, devint curieusement
           entrepreneur militaire et, par la suite, commandant en chef, afin de protéger directement
           ses intérêts financiers.    Ce qui est intéressant c’est que Callot, en se basant sur un dessin
           de la ville forteresse de Breda réalisé par un ingénieur militaire, c’est-à-dire une repré-
           sentation de la guerre qui en soulignait  le côté technologique et rationnelle, aboutit à un
           récit historique, une vision perspective dans laquelle l’héros, le commandant Spinola,
           occupait justement un rôle de premier plan .       Callot utilisa la gravure pour illustrer
           également une série d’événements de la vie militaire, un thème que, par la suite, il dé-
           veloppa de deux manières.  D’un côté,  les Exercices Militaires, treize gravures éditées
           après sa mort, en 1635,  qui représentaient, d’une certaine manière, une suite, même si à
           échelle réduite et simplifiée, aussi bien qu’un complément, du célèbre manuel publié à
           Amsterdam en 1607 par le graveur Jacob de Gheyn,  intitulé Maniement d’armes, d’ar-


           2    Ivi, p. 437.
           3    Le collezioni d’arte della Cassa di risparmio in Bologna. Le incisioni, i, Giuseppe Maria Mitelli, par franca
               Varignana, Boulogne, Cassa di risparmio in Bologna, 1978, planche 150. Une autre intéressante incursion
               de Mitelli dans l’univers de la guerre est offerte par la planche  n. 143  de 1692, intitulée Frutti di guerra
               (Fruits de guerre) et illustrée par l’inscription suivante : «Europa è in fuoco e fiamma, vengan malanni a chi
               la guerra brama» (L’Europe est ravagée par la violence, malheurs à ceux qui veulent la guerre) . Mais, dans
               ce cas-la,  le ‘pacifiste’ Mitelli est encore, malgré le titre e la morale ‘oecuménique’, à l’intérieur du monde
               militaire: les «malheurs» concernent cinq vétérans appartenant à cinq armées différentes,  qui sont sortis
               assez mal en point de la guerre (le soldat a perdu une jambe, la tête du porte-étendard est cassée, etc.)
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