Page 344 - Conflitti Militari e Popolazioni Civili - Tomo I
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           visagée à travers l’expérience qu’a Daza du traitement de la blessure du prince Charles et
           d’autres cas, et les processus gynécologiques. Nous ne pouvons pas les analyser ici, mais
           d’autres auteurs s’en sont déjà occupé.
              Nul doute que le plus intéressant est l’objectif poursuivi. Daza est en effet le premier chirur-
           gien espagnol à avoir écrit en castillan, « dans notre langue espagnole » dit-il. Jusqu’alors,
           les ouvrages scientifiques sont écrits en latin, une langue qu’il connaît parfaitement. Il lui
           aurait d’ailleurs été plus facile de suivre la tradition . Mais il avait pris conscience que de
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           nombreux chirurgiens « de langue romane », doués pour l’exercice de leur profession, ne
           pouvaient pas atteindre le niveau requis faute de texte dans leur langue et faute de connaître
           le latin. C’est à eux qu’il adresse son livre, après avoir constaté que, dans d’autres pays, on
           utilise déjà les langues romanes dans l’enseignement. Il a d’ailleurs une réflexion curieuse
           sur l’italien : « Je ne sais pas pourquoi, dans la langue italienne, qui n’est pas meilleure que la
           nôtre, et est peut-être même moins bonne, il y a des traductions d’un nombre infini de livres
           grecs et latins, sur toutes les professions, alors que la nôtre en a si peu. » Pour expliquer ce
           phénomène, il suggère « que la curiosité qu’ils ont en excès, fait chez nous défaut ».
              Le livre s’adresse aux chirurgiens et, par conséquent, ne manque pas d’allusions criti-
           ques au comportement des médecins « qui s’entretiennent par trop de philosophie naturelle
           sans en arriver jamais au remède pour les malades » . De toute évidence, la formation qu’ils
           recevaient était excessivement spéculative et assez éloignée de la réalité quotidienne. toute-
           fois Daza les critique trop durement lorsqu’il les compare à ces « figuiers fous qui, par leur
           verdeur et leur fraîcheur, séduisent quiconque les regarde. Mais une fois arrivé tout près, on
           maudit leur stérilité ». il aspire à écrire « avec plus de profit que de spéculation » et il est, de
           plus, conscient du fait que de nombreux chirurgiens manquent de préparation, ce qui justifie
           le dicton populaire voulant que « à chirurgien clément, malade manchot ».
              Outre son œuvre, la contribution de Daza aux services de santé espagnols a été significa-
           tive. Il était le contemporain du chirurgien français Ambroise Paré, qui avait révolutionné le
           traitement des blessures par arme à feu en remplaçant l’huile bouillante qu’on versait dessus
           par un pansement « doux » .
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              La cautérisation de ce type de blessures et l’utilisation de l’huile répondaient à la croyan-
           ce que, avec le projectile, un peu de poudre pénétrait dans l’organisme. Conformément à la
           théorie galénique des qualités, puisque la poudre était fabriquée avec du charbon, du sou-
           fre et du salpêtre – trois composants jugés « chauds » –, leur union devait être encore plus
           « chaude », et par conséquent toxique au plus haut point. Il fallait donc éliminer le poison par
           le feu et provoquer ensuite une suppuration pour compléter ce « nettoyage » .
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           28   Dans son prologue, il affirme que s’il s’était contenté d’employer le latin, il n’aurait pas dû rechercher « l’in-
               terprétation du vocable employé par les chirurgiens, ni traduire les textes des anciens et des modernes », ce
               qu’il a dû faire au prix d’un gros effort.
           29   L’anecdote, qu’il raconte dans ses Voyages faits en divers lieux, sur les raisons qui imposèrent cette nouvelle
               orientation thérapeutique est bien connue. Apparemment, Paré appliquait de l’huile bouillante sur les plaies
               lorsqu’un jour, en raison du grand nombre de blessés, les provisions vinrent à manquer. Il dut alors se conten-
               ter de nettoyer les plaies et d’appliquer un soin occlusif avec un pansement. Le lendemain matin, il s’aperçut
               que ces blessés-là se trouvaient bien mieux que ceux à qui il avait pu appliquer de l’huile.
           30   Cardoner, A. « La Cirugía en Barcelona en el siglo dieciocho antes de la fundación del Real Colegio de la
               misma facultad (1700-1760) ». Medicina e Historia, 22, Barcelone, 1973.
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